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Le laboratoire expérimental révolutionnaire (1789 = ouverture des états génénéraux)


La révolution libérale (juin 89 – août 92)

· Rappel chronologique :

Hiver 1788 : de nombreux auteurs réclament le doublement du nombre des députés du Tiers Etat, et que le vote se fasse par tête.

24 janvier : Louis XVI accorde le doublement du Tiers Etat, mais ne prend pas partie sur la question du vote.

5 mai : ouverture des Etats Généraux à Versailles. Les cahiers de doléances ont été rédigés dans un climat contrasté : espoir immense (né de l’annonce de la réunion) mêlé à des angoisses et incertitudes (raisons économiques). Réponse à la question du vote n’est pas apportée : désaveu implicite. Les députés du Tiers Etat refusent de se réunir en chambres et de vérifier les pouvoirs de leurs députés.

11 juin : les députés du Tiers Etat décident de procéder à l’appel nominal de tous les députés.

13 juin : des petits curés rejoignent le Tiers Etat = l’appel a été entendu.

15 juin : l’appel est terminé.

17 juin : le Tiers Etat et quelques curés se proclament Assemblée Nationale. Les députés, qui représentent 96 % de la population sont fondés à interpréter la volonté générale. La souveraineté revient à la nation, qui l’exerce par des représentants.

Le roi veut empêcher les députés de se réunir et fait fermer la salle. Les députés se réunissent le 20 juin dans la salle du jeu de Paume, ils prêtent le serment de ne se séparer qu’après avoir doté la France d’une constitution.

23 juin : Louis XVI annule la séance du 17 juin. Il menace de faire recours à la force pour faire plier les députés.

25 juin : de lui même, le clergé rejoint l’Assemblée Nationale.

27 juin : Louis XVI annonce la fusion des 3 ordres : il ordonne à la Noblesse de rejoindre l’Assemblée Nationale.

9 juillet : L’Assemblée Nationale se proclame Assemblée Constituante.

Ce coup d’état contre la royauté aurait pu être anéanti par la force, mais les révolutionnaires du Tiers Etat bénéficiaient d’un fort soutien dans l’opinion publique.

3 révolutions de juillet 1789 :    – du 11 au 14 (départ de Necker) : révolution de Paris (crainte d’un coup de force militaire étranger)

– des autorités municipales sont déposées, et remplacées par d’autres, favorables à la constituante.

– paysanne : les deux dernières semaines de Juillet sont caractérisées par le phénomène de Grande Peur = les paysans redoutent une invasion de la France par des armées étrangères. Retournement contre les Seigneurs.

La Constituante se sépare en octobre 91 en laissant place au roi et à l’assemblée unique dans un climat politique très dégradé, suite à la constitution civile du Clergé d’août 1790 (texte condamné par le Pape et qui a conduit à un schisme au sein du Clergé entre les prêtres jureurs et les prêtres réfractaires) et à l’attitude de Louis XVI (tentative de fuite).

Seul point de convergence entre le roi et l’assemblée = la nécessité de faire la guerre à l’Autriche (assemblée veut exporter la révolution et pense que cette guerre va amener le roi à révéler sa position anti-révolution ; le roi espère la défaite de la France pour récupérer son trône de monarque absolu. La guerre est déclarée le 20 avril 1792. Les nombreuses défaites rejaillissent sur le roi, présenté comme un traître à la nation = le peuple demande la déposition du roi. En juin, il met son veto à une mesure visant à renforcer la protection de Paris : il déclenche une journée révolutionnaire contre lui le 20 juin. Le 10 août, nouvelle journée révolutionnaire : la pression populaire réclame la suspension du roi, que l’assemblée finit par voter. Fin de la monarchie constitutionnelle.

· La naissance d’un nouvelle société.

* Destruction de l’ancien ordre social : la grande peur a secoué la campagne française dans la seconde moitié du mois de Juillet 1789. L’énergie est utilisée contre les propriétés des nobles et du Clergé. La nuit du 4 août 1789 a aboli les privilèges : deux députés de la Noblesse enclenchent le mécanisme de l’abolition des privilèges. Le droit de propriété n’est pas remis en cause, mais on permet aux paysans de se libérer des droits féodaux en les rachetant 30 fois leurs valeurs annuelles.

* L’acte de naissance d’une nouvelle organisation sociale : la DDHC 1789.

L’assemblée constituante souhaitait proposer un nouveau contrat social, mais certains députés trouvaient dangereux de proclamer abstraitement des droits sans expliquer comment ils seraient mis en œuvre = nécessité de rédiger aussi une déclaration des devoirs, mais pas fait cette fois-ci. Le texte est adopté le 26 août, mais les députés sont peu satisfait et envisagent de réaliser des modifications ultérieurement.

Nature et contenu : – c’est une déclaration = elle n’a pas de réelle portée juridique.

– contenu = triomphe de l’individualisme libéral, avec mention de droits naturels, inaliénables et sacrés. Ces droits sont la Liberté, la Propriété, la Sûreté, et la Résistance à l’oppression. L’égalité juridique figure également dans la DDHC, mais seulement en tant que droit de l’homme. La hiérarchie sociale doit reposer sur le mérite individuel.

· L’œuvre constitutionnelle de la constituante.

* La souveraineté nationale : la nation devient le siège du pouvoir souverain : l’idée de nation n’est jamais vraiment définie par les révolutionnaires (Sieyes =  » un corps d’associés vivant sous une loi commune et représentés par une même législature »), car ils ne voulaient pas donner le pouvoir à tout le monde. Le vote est donc une fonction.

* La séparation des pouvoirs : produit d’importation de l’histoire constitutionnelle anglaise (Montesquieu). « Le pouvoir doit arrêter le pouvoir ». Les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires sont séparés et confiés à des organes distincts : le pouvoir de l’un contrebalance donc celui de l’autre.

* La constitution des 3-14 septembre 1791 : texte constitutionnel long + un préambule qui réaffirme la disparition de l’Ancien Régime et confirme les principes de la DDHC 1789. La souveraineté est une, indivisible, inaliénable, et imprescriptible. Elle appartient à la nation, qui l’exerce par la voie de ses représentants = le Corps Législatif (745 membres, 2 ans, SCI = 25 ans et 3 jours de travail) et le roi (héréditaire). Séparation très rigide des pouvoirs = les moyens de pression sont très réduits.

Prééminence de l’assemblée qui dispose de tout le pouvoir législatif (sauf promulgation, et roi a un droit de veto suspensif, levé si les deux législatures suivantes votent le même texte) et qui dirige le contingent militaire. L’assemblée ne peut être ni dissoute, ni ajournée.

Les deux pouvoirs sont donc condamnés à vivre ensemble. Le seul point de contact est le droit de veto = il va rendre le roi impopulaire.

· La refonte des institutions administratives et judiciaires.

* Refonte administrative de la constituante.

– le nouveau découpage administratif : dès septembre 89, le comité doit définir rapidement un nouveau cadre rationnel d’organisation territoriale. Le but étant de rationaliser la carte administrative et d’unifier le régime d’administration pour que tous soient soumis aux mêmes principes. Sieyes et Thouret ont proposés un découpage en espace égaux = 80 départements carrés de 18 lieues de coté, divisés en 9 districts, eux même divisés en 9 cantons.

3 lois de septembre 89, décembre 89 et février 90 consacrent les communes, villes, paroisses comme entités juridiques distinctes, découpent le territoire en 83 départements, districts, cantons, communes.

– élection au suffrage censitaire : le Conseil général de département (simple relais de l’administration centrale), le Conseil Général de District (subordonné aux administrations départementales), et le Conseil Municipal. Il s’agit de pouvoirs délibérants, donc non permanents. Seule la commune est une vraie collectivité locale (=autorités locales élues et prise en charge de la gestion des affaires locales). Dès 1793, retour à la centralisation.

* Réforme judiciaire de la constituante : but de la réforme = abaisser le judiciaire ; elle crée donc une fonction : appliquer mécaniquement la loi sans l’interpréter (méfiance vis-à-vis des parlements d’AR et principe de primauté de la loi). Consécration avec la loi des 16-24 août 1790.

– principes directeurs de la réforme : simplification (tout ce qui existait avant est supprimé ; ressort des nouvelles juridictions coïncident avec les circonscriptions administratives), participation des citoyens (ils élisent les juges = de simples citoyens avec 5 ans d’expérience de profession juridique ou judiciaire ; le ministère public est nommé à vie par le roi, et est inamovible), confiance dans l’arbitrage et la conciliation (arbitrage = un tiers intervient : possible en droit civil, et obligatoire en matière familiale ; conciliation = un juge recherche une solution à l’amiable : obligatoire en matière civile. En cas d’échec, le litige est porté devant le juge).

– nouvel étagement judiciaire : suppression de la vénalité des offices, et toute juridiction de l’AR ; nouvelle organisation judiciaire distingue entre les juridictions civiles et pénales.

Juridictions civiles :   – juge de paix (1 par cantons = env. 6000) : conciliateur et juge (tx ressort = 50 livres ; seuil comp. = 100 livres).                    – le tribunal civil de district (1 par district) : 1er ressort >100 livres ; appel des juges de paix et des TCD devant un des 7 TCD les plus proches (peur de CA dont le ressort serait important)

Juridictions pénales :    – le Tribunal de police municipale (ressort de la commune) pour les infractions mineures

– le Tribunal de police correctionnelle (ressort du canton) pour les délits

– le Tribunal criminel (ressort du département) pour les crimes. Procédure accusatoire = publique, orale, et contradictoire. Place importante aux citoyens-juges : jury d’accusation et de jugement.

Tribunal de Cassation = gardien suprême de la loi. Juges élus pour 2 départements avec désignation en alternance. But = éviter résurgence de jurisprudences locales. Si le 2nd tribunal de renvoi résiste au tribunal de cassation, le juge procède à un référé législatif.

· Bilan économique de la période 1789-1792.

* Création de structures juridiques favorisant l’économie libérale : la loi d’Allarde (2-17 mars 1791) supprime les corporations et instaure la liberté du commerce et de l’industrie. La loi Le Chapelier (14 juin 1791) instaure un individualisme poussé.

* Libéralisation du sol et transfert de propriété :       – libéralisation partielle du sol (droits féodaux rachetables), puis totale en 1793 (convention abroge mesure de rachat).

– transfert de propriété : les biens du clergé sont mis en vente pour régler le déficit de l’état (les biens appartiennent à la nation, le clergé n’en est que l’usufruitier). Le 2 novembre 1789, les biens de l’église sont déclarés biens nationaux = ils sont morcelés et vendus. Le déficit de l’état est résolu en dépossédant l’ancien ordre le plus riche.

Conséquences : le nombre de propriétaires fonciers augmente, une grande partie de la richesse disponible a été détourné de l’investissement industriel et commercial, désordres financiers importants.

* Les désordres monétaires : besoins d’argent pressants : en décembre 1789, l’état a recours à des titres gagés sur les ventes à venir = des assignats. En avril 1790, l’état donne cours de monnaie papier aux 400 millions d’assignats. En septembre, il en crée de nouveaux pour 800 millions, qu’il utilise pour régler ses dépenses courantes. Comme les dépenses augmentent, l’émission d’assignat augmente, et le cours s’effondre. Les personnes payés par l’état (les fonctionnaires et les créanciers de l’état) sont ruinés ; celles qui ont spéculé sur la baisse des assignats, et les acquéreurs de biens nationaux se sont enrichis.

La révolution radicale.

· Rappel chronologique.

10 août 1792 : prise des Tuileries = chute de la monarchie.

Septembre : élection de l’assemblée constituante (1ère réunion le 21/9)

* La convention girondine (9/92 – 6/93) : 22/9/92 = 1er jour de l’an 1 de la liberté.

Le roi est condamné à mort, puis exécuté le 21/1/93 : cela entraîne l’extension des conflits militaires + des guerres civiles (Vendée)

La Convention crée deux comités = Comité de Sécurité Général (=police) et Comité de Salut Public (=mène effort de guerre). A partir de 4-5/93 les tensions s’accentuent et un conflit éclate entre les Sans Culottes et les girondins = succès des SC le 2/6, 29 girondins sont arrêtés et exécutés. La guerre civile redouble.

* La convention montagnarde (6/93 – 7/94) : les montagnards ne peuvent ignorer revendications des SC, même si elles sont excessives (ils veulent imposer la république même par la force). En septembre, la convention met la terreur à l’ordre du jour. Au printemps 94, l’unité se fissure entre les enragés (terreur, déchristianisation), les dantonistes (compromis avec monarchies européennes), et Robespierre. Le CSP et Robespierre instaure la grande terreur  en  6-7/94, or victoire de Fleurus = terreur injustifiée.

Le 9 thermidore an 2, Robespierre et Saint Just sont arrêtés et guillotinés.

· La constitution montagnarde du 24/6/93 = la constitution de l’an 1.

La convention se met au travail en octobre 92 et désigne une commission de 9 membres.

La DDHC de 1793 insiste sur l’égalité et les droits sociaux. Les droits naturels sont l’égalité (des droits et sociale), la liberté, la sûreté, et la propriété.

La constitution repose sur la souveraineté populaire et renie la séparation des pouvoirs : SUD masculin (21 ans), monocamérisme (Corps législatif SUD 1 an). Le Conseil exécutif est soumis au législatif.

Le projet est soumis à référendum = 2 millions pour, 11 000 contre (5 millions d’abstention). Le 10/8/93, la convention décide de suspendre l’application de la constitution jusqu’au retour de la paix (jamais appliquée mais forte postérité jusqu’en 1946)

· Naissance du Jacobinisme.

Réunion dans la bibliothèque du couvent des jacobins avant séance de l’assemblée pour définir une position politique. Au début, seul un petit nombre de députés du 1/3 état y assistent, puis à partir de 1792, les grands noms girondins et montagnards y participent. Le club est le centre d’impulsion politique de 1790 à 1792, mais son histoire se termine avec la chute de Robespierre.

Un principe d’autorité = sommet du réseau : cellule mère d’où part les mots d’ordre et les informations.

2 pensées maîtresse = l’état doit transformer la société : il doit être fort et synonyme de progrès social

= conception du patriotisme inflexible et unitaire (non xénophobe) : ceux qui ne sont pas avec eux sont à éliminer.

La révolution conservatrice (juillet 94 – novembre 99).

· L’élaboration de la constitution.

La convention thermidorienne a pour objectif de terminer la révolution et de donner au pays une constitution.

Les thermidoriens ne sont ni des royalistes, ni des jacobins. Ils viennent surtout de la Plaine et ont une politique entre royalisme et jacobinisme. Nombreuses difficultés avec les Sans Culottes parisiens (désarmés le 20/5/1795) et les forces royalistes (chouans, …)

* Principes directeurs de la constitution de l’an 3 = souveraineté nationale et séparation des pouvoirs.

La déclaration de 1795 (conservatrice) énonce des droits et devoirs des citoyens = Liberté, Egalité juridique, Sûreté, Propriété.

Le législatif est morcelé en 2 assemblées (le conseil des 500 qui dispose de l’initiative et qui discute les lois, le conseil des anciens qui vote les lois sans les discuter), et l’exécutif est morcelé en 5 directeurs, qui disposent chacun de tout l’exécutif.

Aucune collaboration entre les organes.

Ce système est fragilisé par les élections annuelles, qui peuvent amener une nouvelle majorité, or aucun moyen n’est prévu pour régler les conflits. Il y a donc un risque de blocage.

* Cette constitution a été discréditée avant même son entrée en vigueur : la peur du retour des royalistes a poussé à l’adoption du décret des 2/3 les 22 et 31/8/95. Il prévoit que les 2/3 des députés doivent être élus parmi les anciens conventionnels. Une insurrection royaliste est écrasée le 5/10/95 par Napoléon Bonaparte et Barras.

· La vie politique sous le directoire : l’impossible stabilisation de la révolution.

Le 26/10/95, la convention se sépare = l’histoire du directoire commence. Ce sera une série de coup d’état.

* les élections de 96 : 500 conventionnels et 250 royalistes. Tensions à gauche et à droite (jacobins et Conspiration des égaux)

* les élections de 97 : 500 royalistes au Conseil, mais le directoire est républicain : dans la nuit des 17-18 fructidore an 5 (4-5/9/97), les principaux chefs royalistes sont arrêtés. Le conseil vote des mesures de Salut Public = annule les élections, déportation de députés qui ne sont pas remplacés = il ne reste que 500 députés. La survie de la république est liée à l’armée.

* les élections de 98 : 300 jacobins sur 437 députés. Le 11/5/98, annulation de 150 élections.

* les élections de 99 : majorité de jacobins et le directoire n’annule pas les élections. Les conseils font un coup d’état contre les directeurs, et en remplace 3 pour réviser la constitution. Mais, la révision est trop lourde, et Siéyès aidé par Bonaparte fait un coup d’état le 18 brumaire an 8 : sous prétexte d’un complot, les conseils sont transférés hors de Paris, puis doivent modifier la constitution, mais ils refusent. Le frère aîné de Bonaparte (= le président du conseil des 500) fait croire à la garde que l’on a tenté de supprimer Bonaparte : l’armée se rue dans le Conseil des 500, et les députés s’enfuient. Les anciens votent des mesures de remplacement du directoire par un exécutif de 3 consuls (Bonaparte -Siéyès – Roger Ducos), de suspension des conseils et la création de 2 commissions législatives. On rattrape une centaine de membres des 500 et on leur fait voter ces mesures = le directoire est mort et enterré.