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Les sûretés immobilières générales


Les sûretés immobilières générales sont des privilèges, accordés par le législateur sur l’ensemble des biens immobiliers du débiteur, et qui restent occultes : les créanciers n’ont pas à faire inscrire leur sûreté.

Les créanciers hypothécaires risquent alors de croire à tort que leur créance est garantie alors qu’ils sont primés par d’autres créanciers, et c’est pourquoi le législateur impose une contrepartie aux créanciers titulaire d’un privilège immobilier général, en les soumettant au principe de subsidiarité.
§1 : Le régime des privilèges immobiliers généraux.

A/ Les créances garanties.

Les privilèges immobiliers généraux garantissent :   – les créances des salariés : les salariés bénéficient d’un privilège immobilier général à raison des créances déjà privilégiées sur les meubles du débiteur.

Les sommes dues au titre du privilège des salaires ordinaires sont garanties : le salaire, ses accessoires et les créances de nature indemnitaire, mais le montant garanti est plafonné aux 6 derniers mois de salaire.

Les sommes dues au titre du super-privilège des salaires sont garanties : le salaire et ses accessoires mais pas les créances de nature indemnitaire. Le montant garanti ne doit pas dépasser 2 mois de salaire.

– les créances des créanciers de l’art.40.

Þ Les trois privilèges immobiliers généraux garantissent les mêmes créances que les privilèges mobiliers généraux : ces trois privilèges portent donc sur l’ensemble des biens du débiteur.

Mais les deux autres privilèges mobiliers généraux (le privilège du Trésor public, et le privilège général sur les Caisses de Sécurité sociale) ne sont pas privilégiées sur les biens immobiliers du débiteur : le fisc et les caisses de sécurité sociale sont de simples créanciers chirographaires sur les immeubles du débiteur.

Les salariés et les créanciers de l’art.40 bénéficient d’une garantie légale qui est occulte, de sorte que les créanciers hypothécaires risquent d’être primés. Il y a donc une limite.

B/ Le principe de subsidiarité.

Le principe de subsidiarité (art.2105 c.civ.) impose au créancier titulaire d’un privilège immobilier général de ne saisir les immeubles du débiteur qu’en cas d’insuffisance de l’actif mobilier de ce dernier. Le but est de réduire l’atteinte portée au crédit immobilier par les privilèges occultes.

Techniquement, le créancier hypothécaire menacé par un créancier bénéficiant d’un privilège immobilier général dispose d’un droit de discussion analogue à celui dont dispose la caution simple à l’encontre du créancier : dans le cautionnement, le droit de discussion (art.2021) permet à la caution simple de ne payer qu’en dernier recours si le recours contre le débiteur a été infructueux ; en matière de privilège immobilier général, le principe de subsidiarité permet au créancier hypothécaire d’indiquer au créancier titulaire d’un privilège immobilier général, les biens mobiliers qu’il peut saisir.

L’atteinte au crédit hypothécaire n’est donc que faiblement limitée, puisque le créancier hypothécaire doit démontrer l’existence d’un actif mobilier saisissable, la charge et le risque de la preuve pesant sur lui.
§2 : Les effets des privilèges immobiliers généraux.

A/ Le droit de préférence.

Le droit de préférence reconnu aux privilèges immobiliers généraux nuit doublement aux créanciers hypothécaires :         – il prime normalement les créanciers hypothécaires même inscrits antérieurement ;

– les créanciers munis d’un privilège immobilier général bénéficient de l’indivisibilité, à savoir que le privilège s’exerce sur tout élément d’actif pour la totalité de la somme garantie par le privilège. Concrètement, si le débiteur a plusieurs immeubles, le créancier pourra réclamer paiement de la totalité de sa créance privilégiée sur un seul immeuble. Le créancier hypothécaire inscrit sur un immeuble particulier se trouve donc désavantagé par rapport aux autres créanciers hypothécaires inscrits sur un autre immeuble et qui obtiendront un paiement complet. Cette règle engendre donc une certaine injustice.

B/ Le droit de suite ?

La caractère occulte des privilèges immobiliers généraux interdit de reconnaître un droit de suite aux créanciers privilégiés car, le tiers acquéreur n’a aucun moyen pour connaître l’existence de ce privilège.

L’absence de publicité entraîne l’absence de droit de suite, ce qui est une contrepartie à la force du droit de préférence reconnu à ces créanciers privilégiés.

Chapitre 3 : Les conflits de sûretés immobilières.

La hiérarchie des sûretés immobilières est moins complexe que celle des sûretés mobilières car il existe en matière immobilière un nombre plus réduit de privilèges, et car en principe le classement s’opère par la règle de l’antériorité, du moins lorsque l’inscription est prévue.

A/ Le conflit entre hypothèques et assimilés.

Le conflit entre hypothèques et assimilés se règle par la règle de l’antériorité : l’inscription antérieure prime sur celle qui lui est postérieure.

Les inscriptions des créanciers des premiers rangs sont radiées au fur et à mesure qu’elles sont payées, de sorte que les créanciers ultérieurs prennent leur place.

Les privilèges immobiliers spéciaux prennent rang à une date légèrement antérieure à leur inscription : le privilège du vendeur d’immeuble et celui du préteur de deniers prennent rang lors de l’acquisition de l’immeuble par le débiteur, lorsqu’ils publient leur inscription dans les 2 mois de l’aliénation.

La règle de l’antériorité est toutefois inapplicable lorsque plusieurs hypothèques sont constituées le même jour, ce qui est fréquent en présence d’un vendeur d’immeuble et d’un préteur de deniers : dans un tel cas d’inscription simultanée, le privilège du vendeur l’emporte sur celui du préteur.

B/ Les conflits entre sûretés immobilières générales et spéciales.

Les conflits entre sûretés immobilières générales et spéciales sont plus délicats, car les privilèges immobiliers généraux sont occultes.

Þ Classement :        – 1er rang : le super-privilège des salaires.

– 2ème rang : le privilège général sur salaires ordinaires.

– 3ème rang : les créanciers inscrits, selon leur date d’inscription.

– 4ème rang : le privilège des créanciers de l’art.40 (depuis la loi du 10/6/1994).