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L’insertion de l’état dans les Relations Internationales


Les actes de naissance de l’état

Typologie des modes de formation

  • l’amputation : un état existant est amputé d’une partie de son territoire qui va constituer l’assiette territoriale d’un état nouveau. L’état parent subsiste mais sur un territoire moins grand. L’amputation peut se faire contre la volonté de l’état parent (sécession) ou avec son accord (dévolution).
  • le remaniement de la substance d’un ou plusieurs états : la dislocation d’un état unique donne naissance à des états nouveaux et fait disparaître en droit l’état parent ; abandon par plusieurs états de leur indépendance pour créer un nouvel état = un regroupement qui fait disparaître les états parents.

Les actes juridiques accompagnant la formation de l’état

il peut s’agir d’un accord entre états pour créer et garantir un état nouveau (exemple d’un remaniement après une guerre) ou d’accords bilatéraux entre un état parent et la collectivité sur le point d’accéder à l’indépendance (exemple des accords d’Evian). Le problème est qu’un accord de dévolution ne peut pas être juridiquement contesté comme un traité, et on ne sait pas s’ils ont pour effet de créer l’état qui en est l’objet.

La reconnaissance de l’état

Les théories de la reconnaissance

la reconnaissance est l’acte par lequel un état existant dans la communauté internationale constate et accepte officiellement l’existence d’un nouvel état. Il s’agit d’un acte juridique unilatéral par lequel un état atteste l’existence à son égard d’une situation de fait et s’engage à tirer les conséquences que le droit attache à cette existence. Cet acte ne produit pas de droit au profit de son auteur, mais met à sa charge des obligations. Un état qui a reconnu ne peut pas revenir sur sa position dans la mesure où d’autres états ont pu se fier à son comportement = il est dans une situation d’estoppel.

Pour les tenants de la théorie constitutive, la reconnaissance a pour objet et pour effet de créer légalement la situation reconnue = elle donne un statut légal à ce qui resterait sans elle un pur fait.

Pour les tenants de la théorie déclarative, la reconnaissance n’a d’autre objet que de constater l’existence d’un fait, qui porte en lui ses vertus légales.

La liberté de reconnaître : la reconnaissance devrait être une institution légale obéissant à des conditions de fond. En pratique, les états décident dans chaque situation s’ils vont ou non reconnaître un état. L’état qui reconnaît obéit à des mobiles politiques d’opportunité plus qu’à des mobiles juridiques.

Les effets de la reconnaissance

  • elle n’affecte pas la situation objective de la collectivité en cause. L’effet politique est incontestable, car la situation d’un état est d’autant plus assise qu’il est reconnu par un grand nombre d’état. Les effets légaux de la reconnaissance sont nuls ou inexistants, car la collectivité qui remplit les conditions nécessaires à la qualité d’état jouit de tous les droits et attributs attachés à cette qualité d’état.
  • elle modifie la situation subjective de l’état. La reconnaissance tire l’état de l’existence purement introvertie qu’il menait avant pour le faire entrer en relation avec les états qui le reconnaissent. Seuls les états reconnus peuvent mener une vie internationale complète.

Les formes de la reconnaissance de l’état

  • reconnaissance expresse = par un acte spécial qui fait mention de la reconnaissance et de son application à un état. Un message de félicitations adressé par un chef d’état à un gouvernement provisoire constitue une forme moins solennelle de reconnaissance expresse.
  • reconnaissance tacite ou implicite = elle résulte des relations qu’entretiennent certains états = les relations qui supposent que l’état existant a entendu traiter son partenaire comme un état. Cette pratique est peu cohérente, ainsi depuis 1978, les USA entretiennent des « relations privées » avec Taiwan, alors qu’en 78, ils ont reconnu la Chine Populaire ; la réception d’agents consulaires par un état est considérée comme une reconnaissance tacite alors que l’envoi d’agents consulaires n’est pas considéré ainsi ; la conclusion d’un traité bilatéral vaut reconnaissance tacite de l’autre signataire, mais pas dans le cadre d’un traité multilatéral.
  • reconnaissance individuelle ou collective. Une reconnaissance individuelle est le fait d’un état ; une reconnaissance collective est le fait d’une organisation internationale, telle que l’ONU.
  • reconnaissance de jure ou de facto. Une reconnaissance de jure se veut définitive, plénière et irrévocable, alors qu’une reconnaissance de facto se veut provisoire et donc révocable.

Un état face à un nouveau gouvernement a 3 possibilités :

  • soit reconnaître le nouveau gouvernement de jure
  • soit le reconnaître de facto
  • soit ne prendre aucune décision explicite, et se contenter d’entretenir avec les nouvelles autorités les relations nouées avec les autorités précédentes = reconnaissance implicite.

Ainsi, l’état reconnaissant estime que la question de la reconnaissance de gouvernement ne se pose pas et qu’il est donc nécessaire de maintenir les relations avec un état une fois qu’il a été reconnu. C’est l’attitude de la France, qui « reconnaît les états, mais pas les gouvernements ».