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La réorganisation napoléonienne


La constitution du 24 fructidore an 8 (13/12/1799)

Mode de rédaction autoritaire : Bonaparte et Siéyès en un mois = l’exécutif est très fort, et le législatif très faible.

· Une apparence démocratique.

Le suffrage universel est instauré, le régime est représentatif avec 4 assemblées (le Conseil d’Etat prépare la loi, le Tribunat et le Corps Législatif ont la véritable fonction législative, et le Sénat contrôle la constitution), la séparation des pouvoirs est réalisée, et le recours au référendum est prévu.

· La réalité institutionnelle = le césarisme démocratique.

Le suffrage universel est perverti par les listes de confiance (communales = 1/10 des citoyens, départementales = 1/10 des listes communales, nationale = 1/10 des listes départementales), dans lesquelles le Premier Consul puise pour pourvoir les postes. Les membres des assemblées sont nommés, cooptés, désignés par les membres d’une autre assemblée, mais jamais élus.

Le législatif est effacé = aucune assemblée n’a l’initiative, le tribunat discute mais ne peut amender, le Corps Législatif vote sans discuter, le Sénat est muselé.

Un gouvernement personnel et omni-compétent : la constitution désigne nommément 3 Consuls (Napoléon, Cambacérès, Lebrun), mais Napoléon domine les autres. Les attributions sont très larges, et la technique des Sénatus-consulte permet de court-circuiter la procédure législative (le gouvernement prend un acte et le Sénat en vérifie la constitutionnalité).

Référendum plébiscite  sur la constitution le 15/12/99. Résultat en février 1800 = oui très large, mais le résultat a été trafiqué, et de toute façon, la constitution est appliquée depuis le 24/12.

· La loi du 28 pluviose an 8.

Elle réforme l’administration locale : chaque circonscription est dirigée par un agent exécutif unique et un Conseil délibérant, nommé et non plus élu (il n’échappe plus au contrôle du gouvernement central). Le découpage administratif de la constituante est gardé. Au niveau du département, l’exécutif est un Préfet ; dans l’arrondissement : un Sous-Préfet ; pour la commune : un maire.

· La dérive autocratique.

En 1802, un sénatus-consulte nomme Napoléon 1er empereur à vie et renforce ses pouvoirs = un exécutif monarchique.

En 1804, un sénatus-consulte du 28 floréal an 12 crée un empire héréditaire = Napoléon 1er devient Empereur de la République (sacre le 2 décembre 1804).

A partir de 1804, le régime est en fait beaucoup plus absolu que ne le fut aucune monarchie : l’empereur concentre tous les pouvoirs, s’est doté d’un administration très efficace, et règne sur une société qui depuis la révolution n’oppose plus la moindre résistance.

La remise en ordre des grands services de l’état.

Un tri est réalisé entre les créations de la révolution et parfois, on retourne à des solutions de l’Ancien Régime.

· La réforme judiciaire.

Les juges sont nommés par le 1er Consul, qui ne peut pas les révoquer. Après an sénatus-consulte de 1807, l’inamovibilité n’est reconnue qu’après 5 ans et n’est pas automatique (Bonaparte décide).

En matière civile, une juridiction d’appel est reconnue = le Tribunal d’Appel, qui devient la CA en 1804. Le Tribunal de Cassation devient la Cour de Cassation à la même date.

En matière criminelle, le Tribunal criminel devient la Cour d’Assises. Le jury d’accusation est supprimé.

· La réforme des finances de l’état.

La réforme fiscale est nécessaire = peu d’impôts rentrent depuis 1789, car le recouvrement doit se faire par les municipalités. En 1799, une administration chargée des contributions directes est crée. Dès 1800, la levé d’impôt a lieu de façon normale.

La Banque de France est créée le 13/2/1800. Elle devient la banque centrale en 1803 (émission de monnaie fiduciaire). En 1806, le gouvernement nomme le gouverneur et les sous-gouverneurs.

L’unité monétaire est réalisée avec le franc germinal créé le 28/3/1803 (double étalon = or – argent). Stabilité monétaire jusqu’en 1914.

Le contrôle de la société.

· Pacification religieuse et organisation des cultes.

Napoléon = « il faut une religion au peuple. Elle doit être dans la main du gouvernement ».

* la restauration du culte catholique : par le Concordat de 1801, la pape Pie VII reconnaît la république française, condamne le combat contre-révolutionnaire , reconnaît la vente des biens du Clergé et accepte de renouveler tout le haut Clergé français. Le gouvernement reconnaît la religion catholique comme celle de la grande majorité des français et les consuls s’engagent à faire profession de foi catholique.  Le 8/4/1802, le Concordat est modifié par le gouvernement (imposé au Pape). L’église devient soumise au gouvernement, et devient un instrument de propagande impériale en 1806, avec le catéchisme impériale (=apologie de l’empereur).

* les cultes protestants et juifs : ils subissent la même surveillance et doivent rendre les mêmes services.

· Les masses de granit.

* la formation des cadres de la nation : réforme de      – l’enseignement secondaire = création des lycées (moyenne et grande bourgeoisie) en 1802. Un décret du 18/3/1808 crée les académies avec les recteurs les inspecteurs d’académies. La création du bac uniformise l’enseignement des différents établissements.

– l’enseignement supérieur = réorganisation entre 1804 et 1806. Il devient un monopole d’état. Cinq types de faculté (= médecine, droit, théologie, sciences, lettres) et des grandes écoles spécialisées.

* encadrement juridique de la société = codification. Nombreux projets depuis 18ème, mais aucun n’a jamais abouti.

Les travaux préparatoires commencent en 1800 : 4 membres (2 du nord = Tronchet, Bigot de Préameneu ; 2 du sud = Portalis, Maleville) sont chargés de préparer un avant projet. Le projet est terminé en 1801, et envoyé dans les tribunaux d’appel et les tribunaux de cassation. Le projet et les observations sont transmis au Conseil d’état en 1801, mais le Tribunat émet un avis défavorable (projet trop réactionnaire), suivi par le Corps Législatif. Lors du renouvellement du Tribunat, Bonaparte écarte les opposants, puis fait voter le texte titre par titre entre mars 1803 et mars 1804. L’ensemble est promulgué le 21/3/1804 sous le nom de « Code civil des français ».

Le code civil réalise un travail de transaction entre l’ancien droit et le droit intermédiaire = les aspects les plus novateurs  du droit intermédiaire sont effacés et on revient à des solutions consacrées par l’ancien droit.

Le 1er principe est la laïcité = le droit civil est séparé du droit canonique. Les autres principes sont l’individualisme, l’égalité devant la loi, la liberté, et surtout l’autorité.

2 axes = la famille (à l’image du pouvoir napoléonien) dans laquelle l’homme détient la puissance maritale et paternelle (la femme est soumise, le père est le seigneur et maître des enfants), la propriété : le propriétaire est le maître absolu de ses biens = la propriété est unitaire et libre (le code civil se préoccupe plus d’économie agraire que d’économie marchande  et industrielle).

Le code connaît un grand rayonnement jusqu’au 20ème, mais le BGB et le code suisse ont pris la relève.

Autres codes = le Code de Procédure Civile en 1806, le Code de Commerce en 1807, le Code d’Instruction Criminelle en 1808, le Code Pénal en 1810.

L’œuvre de Napoléon est considérable sur le plan institutionnel (modifications au 20ème, mais l’armature institutionnelle de la France reste de l’époque napoléonienne) mais il n’a pas trouvé de gouvernement qui rallie les français.