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La notion d’acte de commerce


Section 1 : Les définitions de l’acte de commerce.
§1 : La définition du code de commerce (article 632 du code de commerce).

Est un acte de commerce : tout achat de biens meubles pour les revendre en nature ou après les avoir travaillés ; tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre, à moins que l’acquéreur n’ai agi en vue d’édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux ; toute opération d’intermédiaire pour l’achat, la souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de commerce, d’actions ou parts de société immobilière ; toute entreprise de fourniture, d’agence d’affaire, établissement de vente à l’encan (vente aux enchères d’effets immobiliers), de spectacles publics ; toute opération de change, banque et courtage ; toute opération de banque publique ; toute opération entre négociants, marchands et banquiers ; entre toute personne, la lettre de change.

L’article 633 répute acte de commerce des opérations relatives au transport maritime et à l’exploitation de mines.
§2 : Les définitions doctrinales.

Au XIXème, un acte de commerce s’interpose dans la circulation des richesses entre producteur et consommateur.

Pour d’autres, il a pour but de réaliser des bénéfices en spéculant sur la transformation ou l’échange des produits.

Il réalise une entremise dans la circulation des richesses, effectué avec l’intention de réaliser un profit pécuniaire.

Þ Les idées de spéculation et de circulation sont rattachées à la notion d’actes de commerce.
Section 2 : Le régime juridique de l’acte de commerce.
§1 : La preuve des actes de commerce.

L’article 109 du code de commerce prévoit qu’à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens, sauf disposition législative contraire. Le contenu d’un écrit pourra aussi être contesté par tous moyens. Cet article ne s’applique que si le commerçant agit dans l’exercice et pour l’intérêt de son propre commerce. Les articles 1325 (nombre égal d’originaux et de parties), 1326 (double inscription manuscrite de la somme) et 1328 (formalités donnant date certaine à l’acte) du code civil ne s’appliquent pas en matière commerciale.

Þ Un formalisme propre au droit commercial visant à protéger les parties et la sécurité des tiers, apparaît. Différents contrats commerciaux doivent être passés par écrit, et leur contenu est prédéfini (ex : vente d’un fonds de commerce).

La généralisation des moyens informatiques (télécopie, paiement par carte électronique,…) a rendu plus difficile la détermination de la charge et de l’administration de la preuve. Un groupe de travail a été mis en place par le ministère de la justice pour préparer un avant-projet de loi articulé autour d’une nouvelle définition de la preuve littérale, sur la force probante de l’écrit électronique, et de la définition même de la signature.

Les évolutions économiques ont conduit, en droit de la concurrence, à une accélération des procédures, et dans certaines situations, on a constaté que la part de production des preuves était confrontée au secret des affaires.
§2 : Les règles relatives à l’exécution des obligations commerciales.

La règle de la solidarité se présume en droit commercial, alors qu’elle doit être mentionnée en droit civil.

La clause compromissoire est autorisée en droit des affaires : les commerçants peuvent ainsi éviter conventionnellement les procédures judiciaires.

Depuis la loi de 1991, il est possible, en droit civil, d’effectuer une mise en demeure par tous moyens, et non plus seulement pas exploit d’huissier ou citation de justice. Le droit commercial admet cette solution depuis un arrêt de la Cour de cassation du 28/10/1903. En pratique, la lettre recommandée avec accusé de réception permet de prouver plus facilement que le destinataire a bien reçu le courrier. En matière commerciale, un télex, un télégramme, une télécopie,… peuvent être considérés comme des preuves de la mise en demeure.

L’inexécution des obligations par une des parties est en principe sanctionnée, en droit civil, par la résolution judiciaire du contrat (effacement rétroactif des obligations des parties, et versement de dommages et intérêts par le responsable de l’inexécution). En droit des affaires, le juge peut refaire un contrat, s’il a été seulement partiellement exécuté. Ainsi, la jurisprudence a pu décider qu’en cas de livraison de marchandise de qualité inférieure à celle prévue, la résolution ne sera pas prononcée mais l’acheteur paiera un prix moins élevé (CA Paris, 17/3/1987).

En matière commerciale, un acheteur, après avoir mis en demeure son vendeur de livrer, peut se fournir chez un autre partenaire aux frais du vendeur dans certaines conditions.

L’article 189 du code de commerce précise que les obligations qui existent entre un commerçant et un non commerçant se prescrivent par 10 ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes (une prescription de 3 ans existe). En droit civil, la prescription extinctive est de 30 ans.
§3 : La question des actes mixtes.

Un acte mixte est un acte passé entre un commerçant et un non commerçant (Ex : recours à une agence matrimoniale, expulsion d’une boite de nuit par un videur,…).

Le régime applicable à ces actes mélange des règles de droit civil et de droit commercial. La capacité commerciale va être requise pour le commerçant tandis que la capacité civile sera suffisante pour le non commerçant. De même, la preuve est libre pour le commerçant tandis qu’elle est réglementée pour le non commerçant.

En matière de compétence, la décision se fera en fonction de la qualité du défendeur : si pour le défendeur, l’acte est – commercial, le demandeur pourra l’assigner devant le tribunal civil, ou devant le tribunal commercial.

– civil, le demandeur doit normalement l’assigner devant une juridiction civile, mais une clause attributive de juridiction pourra être valable dans certaines conditions.

Cette dualité de régime reflète la présence l’incertitude qui existe en ce qui concerne le choix entre les conceptions considérées comme : – objective : le droit des affaires est le droit des actes de commerce.

– subjective : le droit des affaires est le droit des commerçants.

Un ensemble de textes est destiné à protéger le non commerçant face au commerçant : la loi du 22/12/1972 sur la vente, location et location-vente conclue après démarchage à domicile, intégrée dans le code de la consommation, institue en faveur du client une faculté de renonciation à sa commande pendant un délai de 7 jours.
Section 3 : La classification des actes de commerce.
§1 : Les actes de commerce par nature.

L’article 632 du code de commerce indique qu’un acte est réputé de commerce généralement à raison de l’activité exercée mais qu’il peut également être considéré comme tel à raison de sa forme ou de son objet.

A/ Les actes de commerce à raison de l’activité exercée.

L’article 632 vise les opérations ayant pour objet un achat pour revente qu’il y ai transformation du produit ou non. Normalement, le produit en question peut être un bien meuble ou immeuble. Le législateur souligne qu’il n’y a pas acte de commerce si l’acquéreur a agi en vue d’édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par locaux. Cet aménagement issu de la loi du 9/7/1970 permet aux sociétés de construction de garder leur caractère civil. Ce sont des raisons historiques qui expliquent cette anomalie. A l’origine, le code de commerce considérait que la vente d’immeubles était des opérations de droit civil. Le marché s’est donc organisé autour de sociétés civiles de construction. Dans ces conditions, le législateur n’a pas souhaité inclure les ventes d’immeubles dans la sphère commerciale, car cela aurait impliqué une modification de toutes les sociétés fonctionnant dans ce secteur. Il faut cependant noter que le législateur a eu l’occasion de réglementer spécifiquement les opérations immobilières.

Ne sont pas considérés comme des actes de commerce la production agricole et la vente de cette production par l’agriculteur lui-même, la vente de création intellectuelle par l’auteur lui-même, ni l’activité des professions libérales.

Il est possible de déduire de l’article 632 que les activités industrielles sont réputées être des actes de commerce : les entreprises qui travaillent pour leur propre compte à la fabrication d’objets divers, les entreprises de transport, l’exploitation des mines et les établissements de spectacles publics sont considérés comme accomplissant des actes de commerce.

Dans l’article 632, le code de commerce a présumé acte de commerce tous les actes intervenus dans l’activité financière, en matière de bourse, banque et assurance. Pour le législateur, d’une part certaines activités de location, si elles sont accomplies de façon régulière et si elles concernent des biens précis sont considérées comme des actes de commerce, d’autre part, les activités de service d’intermédiaires tels que la commission (le commissionnaire agit pour le compte de partenaires intéressés par une opération commerciale sans révéler leur identité), le courtage (le courtier met en relation des personnes susceptibles de contracter), et l’agence d’affaires (l’agent d’affaire s’occupe de prendre en main les intérêts d’autrui).

Un problème a pu se poser en ce qui concerne la nature des actes de cautionnement. Le principe ici est que le cautionnement est civil. Mais rien n’interdit aux parties à un accord de lui donner un caractère commercial. De plus, le cautionnement peut aussi être toujours considéré comme commercial s’il est donné par exemple par un banquier. Il peut devenir un acte de commerce lorsqu’il est donné par une caution pour les besoins de son commerce : hypothèse du dirigeant de société qui va se porter caution pour les dettes de sa société.

B/ Les actes de commerce à raison de leurs formes ou de leurs objets.

L’article 632 indique que la lettre de change fait partie des actes de commerce par sa simple forme. La lettre de change (ou traite ou effet de commerce) est un titre en vertu duquel le tireur donne l’ordre au tiré de payer au bénéficiaire une certaine somme d’argent à une date déterminée. Ce bénéficiaire peut être le tireur ou une autre personne nommément désignée : il peut garder la traite jusqu’au paiement, ou la céder par voie d’endossement à une autre personne, qui aura aussi ce double choix. Le dernier porteur va réclamer au tiré la somme portée sur le titre.

Þ Ce procédé est particulièrement adapté au monde des affaires où les paiements s’effectuent rarement au comptant. Il permet la rapidité de l’opération et l’allégement du formalisme. Pour les commerçants, la lettre de change est un instrument de paiement et de crédit.

D’autres effets comme les billets à ordre (écrit par lequel un souscripteur s’engage à payer une certaine somme à une date déterminée à un bénéficiaire), les chèques,… peuvent avoir aussi bien un caractère commercial que civil.

Peuvent être réputés actes de commerce, les opérations relatives au fond de commerce, les cessions de part ou d’action entraînant le contrôle de la société (la jurisprudence a considéré qu’une cession de contrôle de société était une opération commerciale). L’article 1 de la loi du 24/7/1966 déclare « sont commerciaux à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les SARL et les sociétés par actions ». Toutes les opérations effectuées par ces entités sont donc des actes de commerce, car ces sociétés sont des personnes morales normalement destinées à s’insérer dans l’activité commerciale. De ce fait, elles ne peuvent avoir de vie privée (traditionnellement régie par le droit civil).
§2 : Les actes de commerce par accessoire.

A/ La théorie des actes de commerce par accessoire.

Certains actes normalement civils peuvent être intégrés dans une activité commerciale. La jurisprudence a progressivement a déduit la règle selon laquelle les actes faits par un commerçant pour les besoins ou à l’occasion de son commerce deviennent commerciaux par accessoire. Ex : achat de carburant pour les véhicules de l’entreprise.

Il faut deux conditions pour que cette règle s’applique : – l’acte en question doit être accompli par un commerçant, personne physique ou morale, peu importe que l’autre partie soit commerçante.

– l’acte en question doit se rattacher à l’activité principale de son auteur, qu’il soit un complément nécessaire ou un complément normal.

Þ Sont donc exclus tout les actes qui se rattachent à la vie privée d’un commerçant individuel. Mais comme il est souvent difficile de distinguer au sein des actes effectués par un commerçant ceux qui sont commerciaux, le code de commerce (art. 638) présume commerciaux tous les actes effectués par un commerçant, sauf preuve contraire. Dans ces conditions, celui qui souhaite se prévaloir du caractère civil d’un acte doit prouver qu’il n’a aucun lien avec l’exploitation commerciale. Inversement, un acte commercial par nature a un caractère civil s’il n’est que l’accessoire d’une activité ou d’un acte civil. Ex : un spectacle public organisé par un comité des fêtes caritatif.

B/ La portée pratique de cette théorie.

C’est en appliquant cette théorie que le juge a pu qualifier de commerciaux de nombreux contrats qui impliquaient des opérations non prévus par l’article 632.

La théorie de l’accessoire a été retenue par le juge pour des engagements extra contractuels des commerçants, qui naissent à l’occasion et du fait de l’activité commerciale. Ex : les actes de concurrence loyale sont des actes de commerce dans la plupart des cas. En cas de difficulté, on retient cette théorie de l’accessoire. Cette solution se généralise, car elle vaut pour la responsabilité du commerçant si le dommage qu’il a causé est intervenu à l’occasion de l’exercice de son commerce : la victime va avoir une créance commerciale envers le commerçant.
Section 4 : Appréciation critique de la définition légale de l’acte de commerce.
§1 : L’article 632 du code de commerce : une énumération désordonnée.

L’énumération des actes visés par l’article 632 ne présente aucune unité : il s’agit parfois d’opérations isolées (courtage), parfois d’opérations comportant une chaîne d’actions (achat pour revendre), ou d’actes impliquant un montage complexe.

Cette absence de fil conducteur témoigne de l’absence de conception unitaire de l’acte de commerce.
§2 : L’article 632 du code de commerce : une énumération incomplète.

Le transport aérien n’a jamais été rajouté ; les activités de service qui ont actuellement une place important ne sont presque pas mentionnées dans l’article 632. La rédaction elle-même est ancienne et désuète : on parle de « manufactures » et de « négociants ».