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Les sûretés immobilières spéciales


Section 1 : L’hypothèque conventionnelle.

L’hypothèque conventionnelle ressemble au gage sans dépossession, en ce qu’elle confère un droit de préférence au créancier hypothécaire tout en laissant la jouissance du bien au débiteur.
§1 : Les conditions relatives à la constitution de l’hypothèque conventionnelle.

A/ Le contrat d’hypothèque.

1) La capacité spéciale du débiteur.

L’art.2124 c.civ. énonce que la capacité requise pour consentir une hypothèque est celle requise pour aliéner un bien immeuble. Traditionnellement, cette règle est justifiée par le fait que l’hypothèque emporterait risque d’aliénation future, or, en théorie, le créancier hypothécaire le peut tout autant qu’un créancier chirographaire. En pratique, il est cependant utile de tenir compte du fait que le bien hypothéqué est moins libre qu’un autre bien : sa vente est difficile et se fait à un prix tenant compte de l’hypothèque, en raison du droit de suite reconnu au créancier hypothécaire.

2) Le caractère solennel du contrat d’hypothèque.

Le contrat d’hypothèque est un contrat solennel qui échappe au principe du consensualisme.

L’art.2127 c.civ. impose que l’hypothèque soit consentie par acte notarié, à peine de nullité. Le notaire se voit en plus imposer par la jurisprudence certaines obligations spéciales : il est responsable de la nullité de l’acte (en sa qualité de rédacteur), du défaut d’accomplissement des formalités de publicité (en sa qualité de mandataire), et de l’évaluation de l’immeuble hypothéqué (en tant que professionnel de l’immobilier).

3) Un contrat réel accessoire.

Le contrat d’hypothèque vise à garantir au créancier le paiement de sa créance : l’art.2132 c.civ. exige qu’il détermine la créance garantie dans sa cause et son montant (au moins déterminable), et qu’il désigne l’immeuble hypothéqué de manière précise.

Contrairement à ce qui passe dans le gage, il s’agit de conditions de validité et non pas d’opposabilité.

B/ Le bien hypothéqué.

1) Les biens immobiliers présents.

Les biens immobiliers présents du débiteur comprennent tout droit réel immobilier susceptible d’être saisi et vendu aux enchères publiques (art.2118 c.civ.).

Une hypothèque est donc possible sur une pleine propriété, sur une nue-propriété, voire sur un usufruit, auquel cas, l’assiette de l’hypothèque est alors fragile car elle disparaît avec le décès du débiteur.

Sont exclues, toutes hypothèques sur une servitude ou sur un droit d’usage et d’habitation.

L’art.2130 c.civ. prohibe toute hypothèque sur un bien futur du débiteur (il n’a encore aucun droit dessus). Ce principe connaît deux exceptions :                                                       – le débiteur peut hypothéquer des biens futurs si ses biens présents ne suffisent pas à garantir la créance : l’hypothèque de bien futur est valable si le débiteur a quelques biens immobiliers mais de faible valeur, alors qu’elle est nulle s’il n’a aucun bien immobilier.

– l’art.2133 c.civ. permet d’hypothéquer un bâtiment dont la construction est projetée. L’hypothèque est valable lorsque le débiteur dispose d’un droit de superficie : il n’a pas la propriété du terrain sur lequel il battit.

2) La propriété du bien hypothéqué.

L’hypothèque ne peut être constituée que sur un bien dont le débiteur est propriétaire : elle ne peut pas être constituée sur la chose d’autrui, même si par la suite le débiteur en devient propriétaire.

L’hypothèque d’un bien indivis :     – si tous les indivisaires consentent ensemble l’hypothèque du bien, elle sera valable et portera sur l’immeuble lui-même ;

– si un seul des co-indivisaires consent l’hypothèque, sa validité dépendra du résultat du partage : si l’immeuble est attribué au débiteur, l’hypothèque sera rétroactivement validée et ce en raison de l’effet rétroactif du partage (immeuble réputé avoir toujours été la propriété du débiteur).
§2 : La publicité de l’hypothèque conventionnelle (l’opposabilité de l’hypothèque).

L’hypothèque n’est opposable aux tiers que si elle est publiée : l’art.2148 c.civ. impose une inscription, c’est-à-dire que le créancier ou son notaire doit déposer à la Conservation des hypothèques une expédition (copie certifiée conforme) de l’acte constitutif ainsi que deux bordereaux désignant les parties, l’immeuble grevé et le titre qui est la cause de l’hypothèque (la créance garantie).

A/ L’inscription en elle-même.

L’inscription vise à informer les tiers de l’étendue des droits du créancier hypothécaire : le bordereau doit donc indiquer le montant de la créance garantie en capital et en intérêts.

L’inscription n’est possible que pour les 3 années d’intérêts à échoir (art.2151 c.civ.), mais une inscription supplémentaire est possible pour des intérêts pour une période dépassant 3 ans (mêmes formalités).

L’inscription n’est soumise à aucun délai : le créancier inscrit l’hypothèque quand il le veut, à partir de la conclusion du contrat, étant entendu que l’inscription est attributive de rang (en cas de conflit entre hypothèques, l’inscription ancienne sera payée de préférence à l’inscription nouvelle). Toutefois, l’inscription sera paralysée dans 4 cas :   – la publicité de l’aliénation de l’immeuble rend inopposable au créancier hypothécaire toute inscription postérieure de l’hypothèque, car en cas de conflit entre le tiers acquéreur et le créancier qui a acquis une hypothèque du vendeur, celui qui publie en premier l’emporte.

– la publication d’un commandement valant saisie par un créancier chirographaire (qui fait pratiquer une saisie sur l’immeuble) empêche le débiteur d’aliéner son immeuble. L’inscription postérieure de l’hypothèque sera inopposable au créancier chirographaire saisissant.

– la procédure collective : l’art.57 de la loi de 1985 répute nulle toute hypothèque consentie avant la procédure collective, mais inscrite après le jugement d’ouverture.

– l’acceptation d’une succession sous bénéfice d’inventaire rend nulle toute inscription d’une hypothèque constituée du vivant du débiteur mais inscrite après sa mort. Cela tient au fait que le patrimoine du défunt est liquidé, et qu’il convient de le bloquer dans l’état dans lequel il se trouvait à la date de l’acceptation sous bénéfice d’inventaire.

Þ Le créancier a tout intérêt à inscrire au plus vite son hypothèque pour éviter un conflit avec un autre créancier hypothécaire et pour ne pas être soumis à un évènement paralysant le cours des inscriptions.

B/ Les effets de l’inscription hypothécaire.

L’inscription hypothécaire est attributive de rang : l’hypothèque devient opposable erga omnès, mais elle pourra perdre sa valeur en cas de péremption ou de radiation de l’inscription.

1) La péremption.

La péremption est une sorte de prescription extinctive dont est victime l’inscription hypothécaire.

· La péremption d’une créance à terme déterminée (le remboursement du capital doit être effectué à des dates déterminées dans l’avenir) : l’inscription peut être prise jusqu’à la dernière de ces dates augmentées de 2 ans, dans la limite légale de 35 ans.

· La péremption d’une créance à terme indéterminée, ou déjà exigible : l’inscription ne dure que 10 ans.

Þ En cas de péremption, le Bureau de conservation des hypothèques ne pourra plus mentionner l’existence de l’hypothèque. Toutefois, cela n’affecte en rien le contrat d’hypothèque conclu entre le créancier et le débiteur : le créancier peut prendre une nouvelle inscription, qui ne prendra rang qu’à sa nouvelle date d’inscription, si aucun événement paralysant le cours des inscriptions ne se produit.

Pour éviter la péremption, le créancier peut renouveler son inscription (prorogation de la durée de l’inscription initiale) : cela reste possible malgré la survenance d’un événement paralysant les inscriptions.

2) La radiation de l’inscription.

La radiation de l’inscription retire son efficacité à une inscription qui, par hypothèse, n’est pas périmée.

· La radiation volontaire : elle résulte d’une mainlevée, c’est-à-dire un acte du créancier qui estime que l’hypothèque est devenue inutile pour lui (ex : le débiteur a payé sa dette,…).

· La radiation judiciaire : elle se fait sur requête du débiteur, lorsque le créancier refuse à tort d’accorder une mainlevée, notamment lorsque le prix est payé ou consigné.

La réduction judiciaire : le juge peut décider d’office de réduire le montant de la créance garantie sur l’assiette de chaque immeuble s’il estime que la créance garantie est excessive par rapport à l’inscription : l’appréciation du caractère excessif résulte de la comparaison entre le montant des créances garanties et la valeur des immeubles hypothéqués.
§3 : Les effets de l’hypothèque conventionnelle.

A/ Le droit réel accessoire conféré par l’hypothèque conventionnelle.

1) Un droit réel accessoire.

Le débiteur conserve la possession et la propriété de son bien immobilier, mais ses prérogatives sur le bien sont limitées, afin de protéger la valeur de l’immeuble et donc les droits du créancier hypothécaire.

· La limitation des prérogatives du débiteur quant à l’administration courante du bien.

L’usus : le débiteur n’a pas le droit de consentir un bail d’une durée supérieure à 12 ans, sous peine d’inopposabilité du bail au créancier hypothécaire qui a inscrit son hypothèque.

Le fructus : le débiteur ne peut pas obtenir paiement du loyer plus de 3 ans à l’avance, sous peine d’inopposabilité du paiement au créancier hypothécaire : le locataire paiera donc son loyer deux fois.

· La limitation des prérogatives du débiteur quant aux produits (pas de renouvellement périodique) : le débiteur ne peut prélever les produits du sol que s’il effectue une administration normale de son bien.

Þ Les prérogatives du débiteur sont limitées, mais il conserve la faculté de vendre son immeuble. Cette prérogative est toutefois plus théorique qu’effective en raison du droit de suite du créancier hypothécaire.

2) Une hypothèque accessoire d’une créance.

En tant que garantie d’une créance principale, l’hypothèque est indivisible (art.2114 al.2 c.civ.) : si un créancier hypothécaire prend plusieurs immeubles de son débiteur en hypothèque, chaque immeuble répond de la totalité de la dette. C’est en cela que l’hypothèque est indivisible, comme le gage.

En tant que garantie accessoire d’une créance, l’hypothèque suit le régime de la créance qu’elle garantie : le tiers à qui la créance est cédée devient créancier hypothécaire, le paiement réalisé par la caution lui permet de se prévaloir de la subrogation réelle,…

B/ Le droit de préférence du créancier hypothécaire.

Le droit de préférence du créancier hypothécaire suppose un conflit avec les autres créanciers : en effet, le conflit entre créanciers hypothécaires se règle par l’antériorité de la publicité de l’hypothèque ; le conflit entre des hypothèques publiées le même jour se règle par l’antériorité de la créance (art.2134 al.2 c.civ.) ; le conflit entre des inscriptions et des titres de même date se règle par concours.

L’exercice du droit de préférence suppose que l’immeuble soit saisi puis vendu aux enchères publiques.

· La saisie de l’immeuble résulte d’un commandement de payer (acte d’huissier) : le débiteur perd le droit d’administrer l’immeuble, d’en jouir et d’en disposer (art.2032-3 c.civ.) et les fruits produits pendant la procédure de saisie sont immobilisés, ce qui permet d’élargir l’assiette des biens saisis. Cette saisie en vue d’une vente aux enchères publiques est aussi permise à tout créancier chirographaire.

· La vente aux enchères publiques : elle transforme l’hypothèque en un droit sur le prix de l’immeuble. Elle est obligatoire, du fait de l’interdiction des clauses de voie parée (permettant au créancier de faire vendre le bien sans autorisation de justice) et du pacte commissoire (permettant l’attribution du bien au créancier sans estimation judiciaire). La vente de l’immeuble aux enchères publiques le libère de sa charge hypothécaire. On parle alors de l’effet légal de l’hypothèque.

C/ Le droit de suite du créancier hypothécaire (art.2166 c.civ.).

1) L’exercice du droit de suite.

L’exercice du droit de suite suppose que la créance du créancier hypothécaire soit certaine, liquide, exigible, et impayée par le débiteur. Le tiers acquéreur peut donc invoquer la nullité ou la prescription de la créance, ainsi que les exceptions que le débiteur principal peut opposer au créancier.

Lorsque ces conditions sont réunies, le créancier hypothécaire fait sommation au tiers acquéreur de payer ou de délaisser (art.2169 c.civ.) :                                                      – le tiers acquéreur paiera s’il n’a pas déjà payé le prix au vendeur (= au débiteur) ou si le montant de la créance garantie est inférieur au prix de vente de l’immeuble.

En cas de pluralité d’hypothèques constituées sur le même immeuble, le tiers acquéreur qui a payé le créancier hypothécaire de premier rang (inscription la plus ancienne) risque d’être poursuivi par les créanciers hypothécaires de rang inférieur, et c’est pourquoi il est subrogé dans les droits du créancier hypothécaire de premier rang : le créancier hypothécaire de rang inférieur qui veut saisir et faire vendre l’immeuble aux enchères publiques ne disposera d’un droit de préférence sur le prix de vente qu’après désintéressement du nouveau créancier hypothécaire de premier rang, à savoir le tiers acquéreur.

– le tiers acquéreur délaisse : la saisie immobilière suit alors son cours. Cette faculté de délaissement (art.2172 c.civ.) permet au tiers acquéreur de rester propriétaire : l’éventuel reliquat subsistant après la saisie et la vente aux enchères publiques, sera donc attribué au vendeur.

2) La purge de l’hypothèque.

La purge de l’hypothèque permet au tiers acquéreur d’éviter la saisie de l’immeuble, en faisant disparaître l’hypothèque ainsi que toutes les inscriptions prises sur l’immeuble.

La purge ne doit être admise que si elle respecte les intérêts du créancier hypothécaire et de l’acquéreur :  si l’immeuble est vendu dans des conditions garantissant qu’il a atteint son vrai prix, le maintien du droit de suite des créanciers inscrits devient inutile, et leur droit de préférence s’exercera sur le prix de vente.

Certaines aliénations (vente aux enchères publiques,…) valent purge par elles-mêmes : la loi présume irréfragablement que la vente offre toute garantie quant à l’évaluation du bien. L’immeuble est alors purgé de son hypothèque au moment du paiement du prix ou lors de sa consignation.

Lorsque la vente ne produit pas purge par elle-même, le tiers acquéreur fait une notification à fin de purge à ses créanciers hypothécaires, et leur offre le prix de vente :                                                     – ils acceptent l’offre et se payent sur le prix de vente, auquel cas l’immeuble est libéré de son droit de suite lors de la consignation du prix de vente.

– ils estiment que la vente s’est faite à un prix insuffisant, et peuvent alors requérir la mise aux enchères publiques de l’immeuble à condition d’offrir une surenchère du dixième, c’est-à-dire de s’engager à se porter acquéreur à 110% du prix de vente.

Þ Dans les deux cas, l’immeuble sera purgé de son droit de suite.
Section 2 : Les hypothèques légales.

Les hypothèques légales sont des faveurs accordées par le législateur, qui permettent à un créancier d’inscrire une hypothèque sur un immeuble de son débiteur, sans avoir besoin de l’accord de ce dernier.
§1 : Les privilèges immobiliers spéciaux.

Les privilèges immobiliers spéciaux sont accordés aux créanciers qui font entrer une valeur immobilière dans le patrimoine du débiteur. Ils sont soumis au principe de spécialité (quant à la créance garantie et quant à l’assiette) et n’entraînent pas la dépossession du débiteur, mais ils confèrent un droit de suite et de préférence et doivent être publiés pour être opposables aux tiers.

Leur rang remonte à la date de naissance de la créance, et non pas à la date de son inscription : cette rétroactivité tient au fait que l’inscription ne peut intervenir qu’après la conclusion de l’acte faisant entrer la valeur immobilière dans le patrimoine du débiteur. Toutefois, le privilège immobilier doit être inscrit au plus tard dans les deux mois suivants la publicité de l’acte conférant privilège immobilier. En pratique, les notaires déconseillent de faire une opération sur un immeuble dans les 2 mois suivant son acquisition.

A/ Le privilège du vendeur d’immeuble (art.2103 3° c.civ.).

Le privilège du vendeur d’immeuble a pour assiette le bien aliéné, et garantit toute créance résultant d’une aliénation et 3 années d’intérêts à échoir en dehors des dommages-intérêts dus par le débiteur.

Ce privilège est opposable aux tiers s’il est inscrit après la publication de la vente et dans les 2 mois de la vente publiée. L’inscription hors délai est possible en l’absence d’événement paralysant le cours des inscriptions (art.2147 c.civ.) et elle est attributive de rang car le privilège dégénère en hypothèque simple.

B/ Le privilège du préteur de deniers (art.2103 2° c.civ.).

Le privilège du préteur de deniers est très utilisé car l’acquisition d’un immeuble nécessite souvent de souscrire un crédit immobilier. Il a pour assiette le bien acquis, tandis que la créance garantie comprend à la fois le principal et les intérêts dans la limite de 3 années d’intérêts à échoir. Il doit être publié dans les 2 mois suivant la publication de la vente de l’immeuble, sans quoi il dégénère en hypothèque simple.

La loi impose que les actes d’emprunt et de quittance soient authentiques : l’acte d’emprunt énonce que la somme empruntée est destinée à l’acquisition d’un immeuble. Ce privilège fonctionne à peu près comme celui du vendeur d’immeuble, et, en cas de conflit, il est primé par celui du vendeur.
§2 : Les hypothèques légales stricto sensu.

Les hypothèques légales stricto sensu sont accordées à certains créanciers pour des raisons plus ou moins sociales :   – à raison des relations particulières existants entre le créancier et le débiteur (hypothèque légale des époux, hypothèque légale de la personne en tutelle sur les biens immobiliers du tuteur,…) ;

– à raison de l’intérêt public (hypothèque légale du fisc ou de la Sécurité sociale) ;

– à raison du respect dû à l’autorité judiciaire : celui qu’une décision judiciaire rend créancier dispose d’une hypothèque légale sur les biens du débiteur condamné en justice.

Ces hypothèques légales sont générales par leur assiette (elles peuvent être inscrites sur n’importe quel immeuble du débiteur), mais elles prennent rang par leur inscription, ce qui les rend spéciales.
Section 3 : L’hypothèque judiciaire conservatoire.

L’hypothèque judiciaire conservatoire est destinée à empêcher une fraude du débiteur pendant l’instance en justice. Elle est utilisée pour neutraliser le temps mis par un créancier à obtenir une décision judiciaire, ainsi que pour éviter l’insolvabilité du débiteur.

En pratique, le créancier obtient du juge une inscription hypothécaire conservatoire, qui se consolidera en hypothèque définitive lorsque le créancier obtient ultérieurement le jugement de condamnation.

A/ Les conditions de l’hypothèque judiciaire conservatoire.

1) Une créance paraissant fondée.

Pour obtenir l’hypothèque judiciaire conservatoire, le créancier doit invoquer une créance paraissant fondée en son principe et dont le recouvrement est en péril : la créance peut être contestée par le débiteur par des moyens sérieux, ou même ne pas être certaine, liquide et exigible.

Le recouvrement de cette créance doit être menacé du fait que le débiteur ne dispose pas de garanties suffisantes. Le créancier risque d’être impayé, et souhaite donc geler une situation à son profit.

2) L’autorisation judiciaire.

L’hypothèque judiciaire conservatoire doit être demandée au juge en référé, qui statue sans entendre le débiteur afin qu’il ne soit pas prévenu et qu’il n’ai pas le temps de dissimuler ses biens.

Le juge fixe le montant de la créance garantie et indique les immeubles qui seront grevés : l’hypothèque est spéciale et entièrement soumise à l’appréciation judiciaire.

Le créancier doit assigner le débiteur dans le mois suivant l’autorisation sous peine de perdre l’hypothèque

B/ L’inscription de l’hypothèque judiciaire conservatoire.

L’inscription de l’hypothèque judiciaire rend l’inscription opposable aux tiers : elle s’opère en 2 temps.

1) L’inscription provisoire.

L’hypothèque judiciaire conservatoire fait l’objet d’une inscription provisoire suivant les règles ordinaires des inscriptions hypothécaires.

L’inscription provisoire prend rang à la date où elle est prise, étant entendu qu’elle doit être prise dans les 3 mois de l’autorisation judiciaire, sous peine de caducité. Elle est annoncée au débiteur par acte d’huissier 8 jours après l’inscription provisoire, ce qui vise à informer le débiteur afin de faire respecter le principe du contradictoire. Ce débiteur informé peut alors demander la mainlevée de l’inscription hypothécaire en saisissant le juge qui a autorisé le créancier à inscrire.

Cette inscription n’est que provisoire et devra être corroborée par la suite pour devenir définitive.

2) L’inscription définitive.

L’inscription définitive est destinée à consolider le droit du créancier : tant que l’inscription est provisoire, le créancier n’a qu’un droit éventuel, et sa créance ne sera liquide, certaine et exigible que lorsqu’il aura obtenu une décision de justice condamnant définitivement le débiteur.

L’inscription définitive a lieu dans les deux mois du jugement passé en force de chose jugée.

Cette inscription définitive n’est pas une nouvelle inscription hypothécaire car elle reste possible malgré la survenance d’un événement arrêtant le cour des inscriptions (art.2147 c.civ.). Elle n’est pas non plus un renouvellement d’inscription hypothécaire car elle est une condition de validité de l’inscription provisoire qui ne produira effet que si elle est ultérieurement corroborée par l’inscription définitive.

L’inscription définitive prend rang à la date de l’inscription provisoire, de sorte que le créancier prime les autres créanciers hypothécaires inscrits entre-temps.

Conclusion sur les hypothèques : les hypothèques sont des sûretés immobilières spéciales grevant un immeuble. Elles obéissent à un régime commun en ce qu’elles sont toutes des sûretés sans dépossession dont la force réside dans l’effet de la publicité.

L’inscription hypothécaire est nécessairement spéciale, et sert à fixer la force du droit de préférence d’un créancier en cas de conflit avec un autre créancier hypothécaire (règle de l’antériorité de l’inscription) ainsi qu’à conférer à chaque créancier hypothécaire un droit de suite opposable à tout tiers acquéreur du fait de la publicité.

Dans les hypothèques, toutes l’efficacité du système repose sur la publicité mais il arrive que ce système soit remis en cause avec les sûretés immobilières générales, qui sont souvent occultes.